loading . . . On sait pourquoi les Pays Bas ont décidé de prendre le contrôle du fabricant chinois de puces Nexperia On en sait un peu plus sur les raisons qui ont poussé le gouvernement néerlandais à décider de prendre le contrôle de Nexperia, un fabricant chinois de semi-conducteurs domicilié aux Pays-Bas : une décision qualifiée d’exceptionnelle qui a plongé les Pays-Bas dans la guerre technologique entre les États-Unis et la Chine.
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Wingtech, la maison mère chinoise de Nexperia, a en effet déposé un recours devant la cour d’appel d’Amsterdam, une procédure publiée ce mardi 14 octobre, et repérée par le _Financial Times_. Le recours est riche de détails sur les différents événements qui ont poussé la Haye à invoquer une obscure loi datant de la guerre froide, pour prendre le contrôle d’une entreprise étrangère. Nexperia fabrique aujourd’hui des puces électroniques destinées à l’électronique grand public et à l’industrie automobile européenne.
Elle est désormais sous contrôle du gouvernement néerlandais car « _la perte de ces capacités pourrait constituer un risque pour la sécurité économique des Pays-Bas et de l’Europe_ ». Officiellement, ce sont de « _graves lacunes en matière de gouvernance chez le fabricant de semi-conducteurs Nexperia_ » qui auraient incité le gouvernement néerlandais à agir, selon son communiqué publié le 12 octobre. Mais il faut remonter un peu plus loin pour comprendre les dessous de cette affaire.
## En 2019, Nexperia passe dans les mains du géant chinois Wingtech
Tout commence en fait en 2019, année où Nexperia, née de la scission avec la société néerlandaise NXP Semiconductors, passe dans des mains chinoises, celles du géant des smartphones Wingtech.
Si l’entreprise échappe, pendant longtemps, aux sanctions américaines et aux « restrictions aux exportations » – un ensemble de règles destinées à limiter ou ralentir l’accès aux technologies de pointe de pays rivaux des États-Unis comme la Chine – tout change l’année dernière.
## En 2024, Wingtech est ajouté sur la liste des entités américaines
Washington décide en effet d’ajouter le mastodonte chinois Wingtech à sa « _liste des entités_ ». Il s’agit d’une liste noire qui empêche toute société qui s’y trouve d’acheter des produits fabriqués aux États-Unis, sauf autorisation spéciale. Les produits fabriqués chez des alliés – dont les Pays-Bas font partie – y sont parfois inclus. Pour le département américain au Commerce, Wingtech aide la Chine à acquérir des technologies sensibles de fabrication de semi-conducteurs, un composant indispensable à l’industrie automobile, à la défense et aux smartphones.
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La mesure fait partie d’une vaste politique américaine, initiée en octobre 2022, qui vise à couper la Chine de semi-conducteurs, un moyen de la ralentir, voire d’entraver le pays dans ses avancées technologiques.
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## La Haye prend les devants et demande à Nexperia des garanties sur son indépendance
Sachant que Nexperia est une filiale de Wingtech, désormais sur liste noire, le ministère néerlandais de l’Économie décide de prendre les devants. Depuis 2023, le pays européen, allié des États-Unis, et siège du champion mondial des machines liées aux puces électroniques ASML, accepte d’adopter certaines mesures, à la demande de Washington. La Haye a notamment adopté des restrictions d’exportations sur les machines d’ASML… au grand dam de Pékin.
Le gouvernement demande d’abord à la filiale néerlandaise de garantir son « _indépendance opérationnelle vis-à-vis de son actionnaire coté en bourse_ » – à savoir, Wingtech. En d’autres termes, on demande à l’entreprise de séparer ses activités européennes de ses activités chinoises – une séparation qui n’est pas sans rappeler celle de TikTok avec sa maison mère chinoise, ByteDance, aux États-Unis.
En mars, Nexperia répond à la demande, en bottant en touche. Selon un procès-verbal cité par la cour, la filiale néerlandaise estime qu’une « _garantie claire/inconditionnelle concernant l’identité/la présence néerlandaise/européenne ne peut être donnée, car cela restreindrait trop les droits de contrôle des actionnaires_ » et « _limiterait de manière déraisonnable la flexibilité de la société par rapport à ses besoins/projets commerciaux_ ».
En juin, l’administration américaine estime que les opérations visant à séparer activités européennes et chinoises sont trop lentes. Mais tout se précipite en septembre.
## Septembre 2025 : l’ultimatum
D’un côté, le PDG de Nexperia, Zhang Xuezheng, retire les autorisations bancaires de trois des responsables financiers de la société. De quoi susciter l’inquiétude des membres européens du conseil d’administration de Nexperia, qui s’interrogent sur la réelle gouvernance de la société. Ce sont d’ailleurs les « _graves lacunes en matière de gouvernance_ » qui sont mises en avant par le gouvernement néerlandais pour justifier le contrôle de l’entreprise.
D’un autre côté, Washington, en pleine négociation commerciale avec Pékin, durcit le ton. Fin septembre, elle décide d’inclure dans la liste des entités les filiales des sociétés chinoises déjà blacklistées. Résultat, la filiale néerlandaise de Wingtech, Nexperia, allait être, elle aussi, soumise aux mêmes restrictions, à moins que…
À moins que le PDG chinois de l’entreprise ne soit remplacé. C’est notamment ce qui découle d’un procès-verbal d’une réunion entre le ministère néerlandais des Affaires étrangères et le Bureau américain de la sécurité internationale, un document cité dans la procédure. Les États-Unis s’inquiétaient en fait que « _le PDG de l’entreprise soit toujours le même propriétaire chinois ». « Il est presque certain que le PDG devra être remplacé pour pouvoir bénéficier de l’exemption de la liste des entités_ », est-il écrit noir sur blanc.
Résultat, le jour de la mise à jour de la liste des entités, le 30 septembre dernier, le ministère néerlandais de l’Économie invoque une loi jamais utilisée – la loi d’urgence sur la disponibilité des biens. Elle démet de ses fonctions le directeur général, Zhang Xuezheng. Le dirigeant était également l’actionnaire majoritaire du fabricant de puces.
## Les représailles de la Chine sont déjà là
Si la justification officielle est bien de « _préserver les activités et les moyens de production (de Nexperia)_ », il s’agit surtout de répondre aux demandes de l’administration américaine, et d’échapper à la liste des entités américaine. Dans un communiqué publié par Nexperia, c’est désormais le directeur financier de l’entreprise, Stefan Tilger, qui en assurera l’intérim.
Selon un communiqué de la société, « _le comportement de Zhang Xuezheng en tant que PDG et actionnaire indirect, ainsi que les inquiétudes concernant la disponibilité des produits semi-conducteurs aux Pays-Bas et en Europe, ont finalement conduit le gouvernement néerlandais à intervenir_ ». En représailles, la Chine a interdit à Nexperia Chine et à ses sous-traitants d’exporter certains composants et produits vers les Pays-Bas. Le fabricant de semi-conducteurs a déjà expliqué qu’il essayait d’obtenir une dérogation de la part de l’administration chinoise : une dérogation qui ne devrait pas être donnée tant que les Pays-Bas s’aligneront sur les États-Unis.
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