loading . . . Théâtre d’ombres reformule en 60 mots Il faut savoir lire les signes des temps, dit-on : que je m’aventure en terres budgétaire et économique en est un, trop méconnu. Un signal faible, comme ma compétence en la matière, qui ne diffère toutefois guère de celle de trop d’ouvriers du Budget. De quoi lever, temporairement au moins, mon complexe de l’imposteur. Le préambule est primesautier, mais les temps sont graves. A l’image de beaucoup de Français, j’observe ces débats avec la conviction que rien de censé probablement et assurément rien de cohérent n’en sortira. C’est un théâtre d’ombres qui se déroule devant nous, car personne ne croit vraiment ni au respect des délais ni à l’adoption du budget. Alors on s’occupe avec des superlatifs : on ne parle plus de riches mais d’ultra-riches, de profits mais de super-profits, d’héritages mais de super-héritages. Il faut marquer les esprits, mais rassurer l’essentiel des Français sur le fait qu’ils ne seront pas concernés : les ultras, ce sont les autres. Rassurant, oui, aussi longtemps que les seuils de l’ultra et du super n’évoluent pas trop à la baisse – ce qui n’est pas exclu lorsqu’une députée comme Danièle Obono (certes LFI) présente le crédit d’impôt service à la personne comme une subvention aux ultra-riches. Un matin, nous redécouvrons d’ailleurs que la France s’est dotée d’une surtaxe sur les entreprises. Que les entreprises soient taxées, normal. Que l’on assume de les sur-taxer, voilà qui peut déjà surprendre. Que les députés votent pour augmenter ce qui est déjà une sur-taxe interpelle. Plus encore lorsque l’on se souvient que cette surtaxe a été votée l’an dernier avec la promesse durement arrachée par le gouvernement de l’époque qu’elle resterait exceptionnelle et temporaire. Alléchés par les rentrées fiscales immédiates, les députés intègrent-ils vraiment les risques sur l’attractivité de la France ? Il faudrait même ajouter la taxe sur les multinationales, votée un soir d’improbable concorde entre LFI et le RN. A la suite d’Éric Coquerel, président de la commission des finances, beaucoup évoquent un « budget Frankenstein », soit un budget monstrueux, incohérent, offrant de dérisoires victoires symboliques à chacun mais autant de défaites. Car on peut discuter de la fiscalité des entreprises et du patrimoine mais on comprend aussi l’inquiétude devant l’absence d’investissement indispensable pour la jeunesse et l’enseignement ou celle de personnes handicapées qui voient passer dans le budget de la Sécurité Sociale le gel de l’Allocation Adulte Handicapé, le doublement des franchises médicales et la baisse de 20% du budget de l’insertion professionnelle des personnes handicapées. La vérité, je le crains, est que chacun attend la suite sans illusion. Le site d’information parlementaire Projet Arcadie a calculé qu’il faudrait que les députés ne consacrent pas plus de 42 secondes à l’examen de chaque amendement pour tenir les délais. Conscient de l’impossibilité, chacun joue sa partition avec pour seul objectif de frapper l’opinion, les élections en vue. Car on s’attend à ce que le budget ne soit pas adopté et que, malgré les dénégations, le gouvernement le fasse passer par ordonnances, ce qui ne fera probablement qu’ouvrir la voie à une motion de censure. C’est le seul enjeu qui obsède réellement les parlementaires. Alors, plus encore que d’habitude, la politique est ravalée à une affaire de boutiquiers. L’absence de vision est portée à la caricature, alors qu’elle seule permettrait d’envisager les indispensables efforts à entreprendre. Comment en être surpris alors que les derniers débats électoraux, en fait de confrontations de visions, n’ont jamais dépassé le stérilisant « tout sauf le RN » ? Pour les prochaines élections, qu’elles interviennent avant la fin de l’année ou à leur échéance, il nous faudra impérativement sortir de son ombre. https://www.koztoujours.fr/theatre-dombres